No Hye Su - Perséphone ou Proserpine, trop dur comme choix.

☽ La figure paternelle est effacée, un peu floue. Dans un environnement féminin, elle vit malgré elle. L’ainée des jumelles, elle n’a jamais su prendre son rôle pleinement. Non par méchanceté, mais par incapacité. Pas de modèle : une mère étrangère, peu aimante, un père disparu pour une féminine richesse. Si elle en veut à cet homme. Oui : il aurait pu prendre ses filles avec. Non : l’argent c’est toujours mieux qu’avoir faim.

☼ Lire et se plonger dans un monde de fantasme : passion et déception. Jamais réelle, la fiction la frustre et pourtant, elle ne s’en passe pas. Les mots sont chères, de plus en plus coûteux. Ou alors c’est elle qui possède de moins en moins. Mais les hommes aiment les filles cultivées, alors on lui en offre plein, mais dans sa tête, la création fuse, l’imagination se déploie. Devenir écrivain, elle aurait pu.

☾ Son autre n’est pas normale. C’est ce que les médecins disent. On la lui enlève un temps. Paraît que ça lui fait du bien, à Hyera. Mais c’est pas le cas pour Hyesu. Elle se sent seule. Elle a faim et elle jalouse les minettes en minijupe Chanel et talons Louboutins. Parce que ces filles, ont le sait, même avec une sale gueule, elles ont tout ce qu’elles veulent, absolument tout. Elle a besoin de sa petite sœur et la réclame au lieu de la protéger. Égoïste, elle ne se rend pas compte qu’elle ne se comporte pas selon son statut d’aînée.

☼ Combler ce manque : voilà ce après quoi elle court. Mignonne et séduisante, elle sait se faire. Pour tous les goûts. Elle sort avec des plus âgés. Ils l’appellent, elle les accompagne, ça ne va pas plus loin. Mais ils sont généreux et lui offrent tout un tas de cadeaux, et la brune adore ça. Se sentir aimée, se sentir cajolée et choyée. Leurrer le monde et posséder tout : c’est l’euphorie qui s’étend en elle.

☽ Puis un jour, c’est le foudroiement. L’amour ? Qui sait… L’attraction d’un trou noir, gigantesque et dangereuse, oh ça oui ! L’Aphrodite s’y est pleinement engouffrée. C’est beau un temps, puis la pluie fait place. La violence, la soumission. Étrangement, être sous contrôle lui donne du réconfort. Même s’il faut souffrir, soupirer sous ses coups vaut mieux qu’être seule ou que de voir sa sœur avoir faim et ne pouvoir rien y faire.

☼ Mais il faut bien passer à autre chose certaine fois. Hyesu s’est lassée. Devenir bleue n’est pas sa finalité. Alors à ce Vulcain en fusion, elle fait ses adieux à sens unique, car lui n’est pas prêt à abandonner sa céleste amante. Alors chez elle il entre en fracas. Son corps il maîtrise et son esprit, il tente de labourer une nouvelle fois, sans douceur. Elle accepte ou elle meurt. La brune pleure, crie et sa sœur, en un rien de temps la sauve. Le rouge s’épand et ce corps si ardent et brutal devient rigide et froid. Pas le temps de réagir, la panique s’étale. Cacher le corps, il ne reste que cette solution.

☾ Avocat de pacotille, justice défaillante, ils se servent de la faiblesse de sa sœur. Se défendre est un acte criminel. Sur l’île, les deux moitiés sont envoyées mais deux chemins différents elles suivent sans jamais se délier. Chez les chimères, Hyesu trouve sa demeure. Être au service de, voilà une tâche qui lui plait. Elle ne se soucie de rien et fait ce qu’on lui dit, amasse son gain en soufflant son désir. Changeante, soumise ou réfractaire, c’est selon la lune ou le corps, l’humeur ou la tête de l’éphèbe qui souhaite la posséder. Et entre deux soupirs, elle laisse à ses mots le plaisir de charmer autrui.